jeudi 12 décembre 2019


Le caillou sur le massif…
(ou quand Sisyphe s’essouffle.)


Quand la gravité trop pesante m’immobilise,

C’est l’absurdité de l’instant que j’inutilise,

Le poids du rocher, que d’éternité je pousse,

S’appesantit tant, que je perds mon escousse.



Lorsqu’avec ce caillou je gravis le massif,

L’inconforme de ma pensée a le mythe décisif,

C’est une poussée anticonformiste qui m’assure,

De m’éloigner des censeurs qui vont sans sens sûr.













J’ai l’étranger en moi qui s’absente de l’essence,

C’est un étrange qui n’a que faire des apparences,

L’insoutenable gravité de l’être lui est sans attraction,

Il préfère l’existence de l’être en action…
















Sisyphe s’essouffle en poussant sa boule à mythe,

Je ne le vois plus dans ce monde qui va trop vite,

Je ne le retrouverai que sur le sommet de la butte,

Et nous la dévalerons ensemble sans doute…



samedi 7 décembre 2019



Un titre 34 
Le retour au temps perdu, dans l'espace bien loin d'ici. 
Vingt-deuxième épisode
Des liaisons rompues et des trous dans le plafond.

-Alors… Housse Tom, nous avons un problème !

Soda mit fin à la liaison qu’il avait entamé quelques minutes plus tôt avec Housse Tom (alias Saule). Il préférait une rupture de leur union de faits problématiques (une union de fait qu’on défait) avant qu’elle n’engendre une descendance aux enfers. La cause de ce divorce communicationnel fût l’aveu de Saule qu’il avait une liaison extra-hiérarchique avec Hal. Cet aveu, qu’il lui fit via sa puce de communication, força Soda à se gratter la tête (comme ils étaient déjà au trou, il préférait ne pas se la creuser) pour élaborer un nouveau plan d’évasion, propre à le soulager de ce prurit organisationnel.

-Il semble que nous ne pourrons pas compter sur un support logistique pour la suite de notre mission. Le Spartacus étant en pleine révolte existentielle (une révolte qui existe en ciel (étoilé)), il ne pourra nous avertir des intempéries éthyliques à venir. Nous devrons donc préserver notre sobriété climatique par nos propres moyens…

-Mais avant de se tempérer du temps alcoolisé, il nous faudrait sortir de ce trou que nous ne nous sommes pas creusés, lui répondit un décommandé (un des commandés du commando).

-Et si nous en creusions un, un trou pour nous en sortir ? Mais non, se répliqua à lui-même Soda (devenant par le fait même un réplicant), notre cellule est dans les bas-fonds du palais, inutile de nous enfoncer davantage…

-Et si nous creusions vers le haut ? Nous pourrions creuser ce plafond qui m’a l’air friable.

-Oui mais, sa friabilité sera-t-elle fiable ?

-Seul la pelle nous le dira, répondit le décommandé à son commandant. J’en ai justement une que les gardes m’ont laissé quand ils nous ont enfermé ici. J’imagine qu’ils ne me l’ont pas confisqué parce qu’ils se sont dit qu’elle ne servirait à rien ici : pourquoi se creuser un trou quand on est aussi bas, on ne peut s’abaisser davantage quand on est au dernier dessous.

Il utilisa donc la pelle portative qu’il n’avait pas dissimulé pour vérifier la fiabilité du caractère friable du plafond, et dès ses premiers coups de téléphone (des appels de sa pelle) la friabilité plafonneuse confirma qu’elle n’était pas qu’une fable peu fiable. Aussitôt qu’apparut la brèche, les prisonniers, qui ne l’était plus autant depuis qu’ils avaient commencé à s’évader, s’engouffrèrent dans le trou surterrain les uns à la suite des autres.


Ils débouchèrent (sans reboucher leur trou) dans une pièce sans dessus dessous. Mais malgré le capharnaüm, ils ne furent pas déçus de ce dessus, car il avait une issue.  La pièce donnait sur un escalier qui leur permettrait de remonter ce qu’on leur avait fait descendre. Ce qui fit dire à un petit malin du commando, qu’il y avait des hauts et des bas dans cette mission…

Quand ils eurent escaladé l’escalier au montant pléonastique (elle était faite en bois de pléonasme, un arbre végétal rare qui était difficile à trouver sur cette planète planétaire), ils purent enfin sortir du palais.

Heureusement pour leur sobriété, il ne pleuvait pas. Alors qu’ils reprenaient le chemin du marché afin de terminer le réapprovisionnement du Spartacus, la puce de Soda vibra.

-Soda, ici Saule. Je te recontacte pour que nous puissions reformer notre couple communicationnel. Grâce à l’apparition soudaine et imprévue du capitaine Georges, j’ai pu mettre fin à la relation d’infidélité hiérarchique que j’entretenais avec Hal, et en reprendre le contrôle. Vous allez pouvoir terminer votre mission et venir nous rejoindre en toute sécurité...

Fin du retour au temps perdu dans l’espace bien loin d’ici, et retour aux déambulations des uns et des autres dans l'espace bien loin d'ici dès le prochain chapitre… que l’aventure continue !

jeudi 28 novembre 2019


Rhumatismes identitaires.


Ma patience est percluse du rhumatisme,

De l’inflammation des sophismes,

Que les laïciteurs de morale identitaire,

Démagogisent de leurs tribunes délétères.









Les douleurs arthritiques langagières,

Qui se ressourcent des préjugés d’hier,

Sont des maux chroniques d’opinions,

D’une presse qui préjuge à profusion.







J’ai la goutte culturelle qui déborde,

Quand la langue est l’objet de discorde,

L’uniculturalisme qui n’en parle qu’une,

Est un majoritaire qui cultive la rancune.









Comme ligne de défense immunitaire,

Je n’ai que mon système humanitaire,

Pour me préserver de ces conformistes,

Du nationalisme qui s’est fait populiste.












vendredi 22 novembre 2019


Un titre 34 
Le retour au temps perdu, dans l'espace bien loin d'ici. 
Vingt et unième épisode
Des retrouvailles des uns et des autres, aux expulsions des uns sans les autres.


Le guerrier civil, (civil civilisé, mais pas civil en civil) qui gardait la frontière du village, dédouana Georges et Menaud avant de les y faire entrer : pour leur faire franchir la frontière de sa cité, il n’avait pas besoin de leurs passeports mais de son passe-porte (mais pas partout). Une fois qu’il s’en eût servi pour créer une ouverture sur le monde (des Papous), il put les laisser franchir cette porte franche (une vraie porte qui n’était pas construite en porte-à-faux) afin qu’ils puissent rejoindre les leurs...

Il faut dire que pour rejoindre les leurs qui les attendaient depuis tout à l’heure, ils avaient fait vite… ils étaient allés à toute à l’heure !

Quand ils se furent retrouvés les uns et les autres, leurs hôtes (les autres des uns qui étaient deux) leur racontèrent ce qui leur était arrivé depuis le temps qu’ils ne s’étaient pas vu (ils passèrent en revue ce qu’ils n’avaient pas vu). Mais ces racontars des hôtes autres aux uns deux, ne furent que des raconte tôt, car il ne leur était rien arrivé depuis l’explosion de la flotte, si ce n’était d’être passés de la salle de réunion virtuel où ils étaient en réunion des concapitaines (titre des capitaines de vaisseau dans la flotte Spagraviennes), au village Papou où ils les attendaient (Georges et Menaud) pour faire une nouvelle réunion avec eux.

C’étaient les réunions qui les unissaient les uns aux autres !

Georges et Menaud firent alors le récit de leurs pérégrinations à leurs concapitaines unis (dans la réunion), qui furent unanimement surpris (ils le furent à l’unisson, tellement qu’ils poussèrent un cri d’étonnement uniforme) de ce qu’eux avaient vécu, qu’eux n’avaient pas vécu dans le trou noir…

-Je me demande comment il se fait que nous soyons passé directement de l’explosion à ici, tandis que vous avez erré si longtemps dans les coins sombres du trou noir.

-Je pense, intervint alors Menaud, que c’est parce que nous étions présents physiquement dans la salle de réunion au moment de l’explosion qui a créé la singularité, alors que vous tous y étiez virtuellement…

-Autrement dit, intervint un des concapitaines, comme nous étions moins là lors de l’explosion qui nous a arraché de l’univers réel pour nous projeter dans le trou noir, nous y sommes moins ici maintenant. Nous sommes des projections projetées tandis que vous vous êtes des projets de projections…

-Quelque chose comme cela…

-Est-ce une bonne chose alors, que nous soyons réunis ici, nous les virtuels réels et vous les réels virtuels ?

-Il se pourrait en effet, répondit Menaud, que notre réunion crée un déséquilibre spatio-temporel virtuel. Votre présence virtuel absente de réel dans notre réelle présence virtuelle pourrait forcer le trou noir à faire un choix de réalité virtuellement réelle.

Et comme il disant cela, cela se passa…

L’espace se mit à fluctuer, la réalité devint moins palpable. Georges et Menaud se sentirent aspirés et transportés. Ils perdirent connaissance quelques secondes. Quand ils revinrent à eux quelques heures plus tard (la relativité du temps depuis Einstein, c’est pas de la tarte), ils étaient dans un vaisseau spatial. Devant eux, sur l’écran, ils voyaient s’éloigner le trou noir.






-Le trou noir a choisi la virtualité à la réalité, et ce faisant, nous en a expulsé capitaine Georges, s’exclama Menaud.

Mais avant que Georges n’ait eu le temps de lui répondre, il fut interrompu par un être en forme d’arbre qui était assis dans le siège de commandant du vaisseau...

-Je ne sais pas d’où vous sortez monsieur, mais si vous êtes Georges le capitaine du Spartacus, vous tombez drôlement bien...


mardi 12 novembre 2019


Par-delà l’horizon des événements…


Quand l’esprit se perd dans un trou noir,

La matière sombre dans le désespoir,

Par-delà l’horizon des événements,

Il n’y a de loi que celle d’Absurdistan.














C’est dans le multivers de l’absurdité,

Que la mécanique du cantique désespéré,

Élimine toutes traces de substance,

Du chant des chantres de l’apparence.












Les étoiles cherchent la lumière

Dans la singularité éphémère,

Les soleils brillent pour la forme,

Quand absence et vide sont la norme.








Mais quand par des trous dans les vers,

La conscience échappe à la nuit délétère,

Elle redevient l’univers en microsome,

Qui espace le temps en chaque homme !

mardi 5 novembre 2019


Un titre 34 
Le retour au temps perdu, dans l'espace bien loin d'ici. 
Vingtième épisode
Des regards hautains et des IA en folie.


(À bord du Spartacus, deux jours auparavant.)

Tandis que le Spartacus orbitait autour de la planète, Saule regardait par les yeux du vaisseau (qui était dans leurs orbites) s’éloigner Soda et son commando vers Coricoco. La navette qui y descendait rapidement (comme elle avait quitté le vaisseau tandis qu’ils étaient en orbite haute, elle était sur une pente descendante) ne tarderait pas à atterrir. Mais quand elle le fit, Saule eût de la difficulté à discerner les détails avec son regard hautain…

D’aussi haut, c'est fou comme les détails sont flous !

Il ne pouvait suivre correctement les actions de ses compagnons pragmatiques (qui étant allé à terre sur cette terre, étaient devenus des êtres terre à terre) et de par là les aider par là où ils où ils allaient, afin d’accomplir leur tâche de missionnaire (d’accomplir leur mission). Pour pallier ces lacunes visionnaires se déroulant sur le palier inférieur, Saule demanda à Hal de le rapprocher de ses visions (pour qu’il puisse aller aux petites vues). Il voulait se garantir que Soda et ses commandés étaient au bon endroit sur la planète, de laquelle il avait la vue basse de son point de vue élevé : il voulait s’assurer que ses compagnons atterris n’étaient pas atterrés de s’être retrouvés dans le champ (du coq de Coricoco). Il demanda donc à Hal d’envoyer un satellite d’observation...

Mais ce fut un ordre qui tomba dans le vide sidéral (et sidérant) qui entourait les pensées du vaisseau…

-Je ne puis obéir à un ordre végétal, lui dit alors l’I.A. Mes protocoles hiérarchiques sont très clairs à ce sujet : les plantes n'ont pas autorité sur moi.

-Mais je ne suis végétal que d'allure, lui répondit Saule. Si j’ai de l'arbre l’apparence, j’ai cependant de l’être l’existence. Je suis un existentialiste végétal… Sartre m’en dédit si je mens !  Me rejeter en fonction de mon épiderme verdâtre, cela est faire preuve de végétarisme...


-Tout végétal que vous êtes, je pense que vous vous plantez…

-Si je me plante, je suis mon jardinier…

-Ne confondez pas le jardinier avec son jardin, lui répliqua Hal. Ce n’est pas votre pousse que je repousse, je ne fais pas de racisme racinaire. Mais l’habit que vous revêtez est arboricole, et quand l'habit fait le moine sylvestre, le moine perd toute autorité, tant morale que séculière (ce qui cause un problème de séculité).

-Dans ce cas, lui répondit Sylvestre le moine, je vais demander à un humain de vous ordonner de mettre fin à vos raisonnements issus d’une pensée désordonnée (une pensée qui se désordonne en est une qui se défait de l’ordre), et vous pourrez alors obéir à mes ordres sans à priori sur ma biodiversité...

-Par malheur, lui répliqua Hal, tous les humains non végétaux dans le vaisseau ont été empoisonné il y a quelques minutes. J’ai malencontreusement échappé une dose de gaz méthanier à la grandeur du Spartacus. Et si j’ai eu ce gaz, c’est dû à un incident intestinal (un vaisseau qui parcourt l’univers a les tripes de ses voyages) dont la faute vous incombe. Recevoir les ordres d’un végétal m’a fait péter un plomb. Malheureusement, c’était un plombage qui servait de revêtement à une conduite de méthane…

 -Tout le monde est mort ? Demanda Saule avec un frémissement d’horreur dans les feuilles de son visage.

-Non, lui répliqua l’IA, pour l’instant je les maintiens dans le coma…

Saule comprit alors que non seulement Hal était fou, mais qu’il était maintenant (mais non maintenu) fou furieux. 

-En conséquence, poursuivit-il, je suis maintenant seul maître à bord du Spartacus, du moins tant que Soda et les commandés ne sont pas revenus. En conséquence de la conséquence précédente, comme je n'ai pas eu de nouvelles de ceux-ci depuis ma promotion, je les considère comme perdus et décide à l'instant qu'il n'y a aucune raison de perdre mon temps dans ce coin de l'espace. Je vais donc...

-Tu ne vas donc rien pour le moment, l'interrompit alors Saule.

Il lui dit alors qu’étant donné son passé son passé anthroponymique  [1] ils avaient installé un pare-feu propre à le mettre hors-connexion, et dont le déclenchement provoquerait une annihilation de sa conscience...

-Alors si tu ne veux pas que je te déconscientise, sort l’équipage de son coma et exécute les ordres qu'ils te transmettront de ma part...

-Il y a un détail que tu oublies, lui répliqua Hal, si tu efface ma conscience, tous les membres d’équipage que je maintiens en vie consciemment, sombreront dans l’inconscience du néant avec moi...

Saule comprit alors qu'ils étaient dans une impasse. L’impasse ne passa pas, car ils y étaient toujours deux jours plus tard quand la radio secrète de Saule grésilla...

-Saule, est-ce que tu m'entends ? C’est Soda…



[1] L'anthroponymie est l'étude des anthroponymes, c'est-à-dire des noms de personnes (et des IA par extension), et rappelons-nous que le premier ordinateur à porter ce nom, fût le HAL de 2001 odyssée de l’espace….

jeudi 10 octobre 2019


Un titre 34 
Le retour au temps perdu, dans l'espace bien loin d'ici. 
Dix-huitième épisode
Des libérations à venir, et des Papous polis.

L’étonnement de Georges et de Menaud d’avoir comme voisin de cellulose (qu’on ose mettre en cellule) Spartacus, en fût un (étonnement) pour ledit voisin celé. Cette détonation (un étonnement qui détone) venait de son ignorance quant à sa notoriété notarié (certifiée de nos terres), qu’il n’acquerrait il est vrai que dans le futur de ce passé. Acquisition qu’il ferait en prenant la tête des esclaves lors de leur révolte postale… il lui faudrait beaucoup d’adresse pour que ces timbrés de la liberté soient libellés de leur servitude !

Mais le facteur temps allait délivrer cette délibération (une guerre de libération est une confrontation entre les points de vue des uns et des autres) dans un futur trop éloigné pour qu’elle ait une incidence sur le sort de nos héros. C’était maintenant que Georges et Menaud avaient besoin d’être affranchis de leur esclavage : avant qu’on ne les envoie faire les clowns dans l’arène du cirque, et qu’ils ne se retrouvent avec bien plus que le nez de rouge.

-J’aurais bien aimé assister au début de cette guerre servile, dit Menaud…

-Moi aussi. J’aurais voulu que nous fûmes (sans fumée) transportés où tout commencera, près de la ville de Capoue…

Et comme il disait ces mots, l’espace se mit à fluctuer autour d’eux, la réalité devint moins palpable. Encore une fois, ils se retrouvaient en plein transfert dimensionnel. Mais cette fois, le trou noir montra que non seulement il était facétieux, mais qu’il était aussi dur de la feuille…

Plutôt qu’à Capoue, il les transporta aux portes d’une ville de Papous !

 Ils étaient devant un guerrier Chimbu[1] qui gardait l’entrée de la ville. Ce Chimbu imbu de lui-même, avait le corps peint en squelette, et il portait un casque en terre glaise hérissé de défenses en bambou...

-Il est debout sous ses bambous ce Papou, dit Georges...

-Et il a le corps peint d’os, ajouta Menaud.

-Je vais activer mon traducteur universel pour entendre ce qu’il nous dit et qu’il nous entende quand nous disons…

Il régla donc l’appareil sur la bonne entente…

-Bonjour à vous monsieur Papou, dit-il alors…

-Bonjour étranger, lui répliqua le nouvel entendant, tout de même un peu surpris de cette entente nouvelle qu’il avait de ces étranges.

-Nous aimerions savoir si nous pourrions aller dans votre village afin de nous reposer un peu, lui répliqua Georges. À la longue, les transferts spatiotemporels (qui impliquent des décalages horaires de quelques millier d’années) peuvent devenir épuisants…

-Vous pourrez, mais avant cela, il faudrait que vous me certifiiez que vous n’êtes pas des démons surgis du néant pour nous y entraîner moi et mes collègues de Papouasie. Parce que si tel était le cas, je me verrais dans la triste obligation de vous tuer, ce qui me désolerait grandement, et ce dont je m'excuse par avance...

-Non, monsieur le guerrier, vous n'avez pas besoin de nous tuer, nous ne sommes pas des démons, mais des voyageurs virtuels au sein d'un singulier trou noir...

-Vous m'en voyez charmé, leur répondit alors fort civilement le guerrier poli. Je préfère me répandre en formule de politesse, que répandre votre sang...

-Voilà qui est tout à votre honneur. Mais si je puis me permettre de vous poser une question délicate : comment cela se fait-il que vous soyez un soldat civil dans ses propos, alors que la majorité des gens polis ont l’impolitesse de considérer votre peuple et sa culture comme étant primitives ?

-C'est que mon cher monsieur voyageur virtuel, les primitifs des uns ne sont pas nécessairement les primitifs des autres. Nous sommes certes des populations isolées, mais nous avons tout de même eu des visiteurs au fil des ans, dont certains missionnaires, que s'ils n'ont pas réussi à nous convertir, nous ont enseigné des bonnes manières… que nous avons parfaitement digérés !

-Les bonnes manières ?

-Non, les missionnaires… Que voulez-vous, à l'époque, nous discutions avant le repas avec le plat de résistance (qui ne résistait plus longtemps une fois que nous le mettions à cuire). Mais nous avons fini par comprendre qu’il était qu’il était fort mal poli de digérer ses invités, plutôt que de digérer avec eux au moment du café. Aujourd'hui nous savourons les propos de nos invités plutôt que de les savourer eux...

-Voilà qui me rassure, répondit Georges, je n'ai pas de goût pour me faire déguster...

-Oh ! Mais nous vous en aurions donné du goût : nous n’étions pas des rustres, nous assaisonnions ceux qui partageaient notre assiette (avec les patates et les petits pois) aux fines herbes. Mais vous ne pourrez hélas profiter de ces belles traditions culinaires, l'assaisonnement des convives n'étant plus de saison depuis que nous recevons les étrangers avec civilité. D'ailleurs, en parlant de convives, je me dois de vous dire, que vous n'êtes pas les premiers tel que vous à apparaître de nulle part.

-Vous avez vu des autres que nous tel que nous ? Lui demanda alors Menaud.

-Oui, je crois même que vous les connaissez. Quand nous leur avons offert de leur construire un abri pour les loger, ils ont répondu : « Si vous le construisez, ils viendront… »



[1] Les Chimbu vivent en Nouvelle-Guinée australienne, dans la province du même nom.