samedi 18 décembre 2021

 

Les barres parallèles…

Chapitre 3

 Des combinaisons recombinantes, et des hypothèses refroidissantes…

 

Pour réussir leur opération de fondation amorphique (se fondre dans la population amorphe pour les confondre (les amorphes)) ils allaient devoir se faire métamorphes. C’est ce que Georges apprit aux navets[1] quand il leur exposa les aléas de la mission à venir. Les aléas étaient de puissants incitatifs à la prudence quand on allait là : les impondérables avaient la fâcheuse habitude de manquer de pondération dans les embûches qu’ils mettaient sur la route de ceux qui allaient en mission, les allures missionnaires. Ils avaient donc tout intérêt (un intérêt sûr (capital, quand il n’était pas emprunté)) à s’y préparer, d’où l’exposition aléatoire (adjectif de la même famille que aléas, son cousin germain au huitième degré) de Georges.

 

Mais pour se faire métamorphes, les navets arguèrent (ils avaient l’art de la guerre) qu’ils avaient besoin de combinaisons recombinantes de leur physionomie. Heureusement, argumenta Georges (il avait l’art du mentat[2]), pour la poursuite de leur entreprise de fonderie opérationnelle, ils n’étaient pas sans : HAL en avait inclus dans l’équipement de la navette. Il avait eu la prévoyance imprévisible quant à ce qu’il faudrait pour cette mission de fondation (fondation amorphique à ne pas confondre avec la Fondation Asimov, qui toute de psychohistoire sous-tendus, n’eût pas surpris, elle, en prévoyant l’imprévisible).

 

-Comment cela se fait-il, demanda Soda, qu’HAL ait eu la prévenance de l’inconnu que nous allions affronter ?   

 

-C’est qu’il dispose d’un hypothétiseur probabiliste. C’est un de ses sous-programme qui évalue tout ce qui pourrait arriver et se prépare en fonction des éventualités les plus probables. C’est une fonction utilitaire, contrairement à l’hypothétiseur complotiste, qui lui est une fonction inutilitaire…

 

-Il envisage tout ce qui pourrait arriver et se prépare en fonction de ce qui est le plus improbable ?

 

-Oui. Heureusement, ce sous-programme, qu’on pourrait aussi qualifier de programme saoul, s’est désactivé lui-même…

 

-Comment cela ?

 

-Il s’est auto-détruit quand il s’est mis à craindre d’être en train de comploter contre lui-même afin de s’emparer du vaisseau. Il s’est échoué pour faire échouer son complot…

 

-C’est le paranoïaque qui se guérit de sa paranoïa en complotant contre lui-même : il n’imagine plus de complot, il y en a véritablement un !

 

-Oui en quelques sortes.

 

-Je comprends pourquoi il a mis des combinaisons métamorphiques, intervint alors Soda, mais pourquoi seulement trois alors que nous sommes douze ? Et pourquoi y a-t-il mis douze sacs mortuaires ?

 

Le silence qui répondit à la question de Soda était pour le moins éloquent, et il fut d’un mutisme refroidissant pour l’enthousiasme ambiant. Heureusement, la lente montée du soleil dans le ciel (Amporphe prenait plus de trente heures pour roter sur elle-même, sa rotation était une longue éructation planétaire) le réchauffa (l’enthousiasme) et ils reprirent leurs discussions en vue de l’élaboration d’un plan d’action.

 

Et une fois que le plan fut, l’action se pu, et elle se fit…

 



[1] Comme précisé précédemment, les membres de l’équipage d’une navette en sont les navets. Et pour les ceux qui ne s’en étaient points avisés, honte à vous ! Cela veut dire que vous n’avez pas lu les chapitres précédents. Cependant, je vous pardonne, en autant que vous le fissiez presto (sans faire chauffer les pommes de terre cependant) …

[2] Dans l'univers fictif de Dune, les mentats sont des ordinateurs humains.